La politique d’immigration du Canada reflète-t-elle les relations influentes mondialistes de Trudeau?

Qui définit réellement la politique d’immigration du Canada au sein du gouvernement Trudeau?

Il n’est pas fréquent que la CBC, qui encourage une forte immigration, soulève des préoccupations concernant la politique d’immigration du Canada. Mais dans un article du 4 janvier, la CBC a remis en question le rôle de la société de conseil McKinsey & Company dans la définition de cette politique.

L’article, intitulé « La valeur des contrats fédéraux d’une société de conseil est montée en flèche sous le gouvernement Trudeau, » indique que les libéraux ont jusqu’à présent dépensé 30 fois plus pour les services de McKinsey que le gouvernement conservateur de Stephen Harper. Sous Harper, McKinsey a reçu un total de 2,2 millions de dollars en contrats. Jusqu’à présent, sous Trudeau, selon la CBC, elle a reçu 66 millions de dollars. Des révélations plus récentes indiquent que les contrats fédéraux avec McKinsey depuis l’arrivée au pouvoir de Trudeau dépassent en fait les 100 millions de dollars.

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Le ministère qui a le plus fait appel aux services de McKinsey est Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). McKinsey a obtenu son premier contrat avec IRCC en août 2018, et depuis lors, IRCC a payé McKinsey 24,5 millions de dollars pour développer et mettre en œuvre diverses stratégies pour sa propre « transformation. » Selon un porte-parole de l’IRCC, McKinsey a été chargé de revoir, de développer et de mettre en œuvre des outils, des processus et des services numériques. Des sources anonymes au sein d’IRCC, qui estimaient que les bureaucrates du ministère avaient été mis de côté, ont rapporté que l’influence de McKinsey sur la politique d’immigration canadienne s’était accrue ces dernières années à l’insu du public. La professeure Isabelle Fortier de l’École nationale d’administration publique au Québec a déclaré que le recours à des sociétés telles que McKinsey supplante l’expertise interne de la fonction publique et fonctionne comme un gouvernement fantôme sans transparence ni légitimité.

L’article de la CBC note que les objectifs d’immigration du gouvernement fédéral annoncés en novembre 2022 sont très similaires aux recommandations du Conseil consultatif sur la croissance économique, créé par le gouvernement libéral en décembre 2015 et présidé jusqu’en 2019 par Dominic Barton, alors directeur mondial de McKinsey.

McKinsey et le Forum économique Mondial

Selon les propres termes de McKinsey, l’entreprise fonctionne comme « un partenariat mondial unique » depuis sa fondation en 1926. En parcourant son site web le 16 janvier, jour de l’ouverture de la réunion annuelle 2023 du Forum économique mondial à Davos, on pourrait croire que l’objectif premier de McKinsey est de mettre en œuvre l’agenda du FÉM. Ce jour-là, la bannière supérieure de la page de renvoi du site web de McKinsey indiquait « Pourquoi Davos est plus important que jamais, » avec le sous-titre « Les défis mondiaux appellent un leadership mondial. » Juste en dessous de cette bannière, nous étions invités à rencontrer les Young Global Leaders « Jeunes Leaders mondiaux » du FÉM. Le Forum des jeunes leaders mondiaux a été créé par le président du FÉM, Klaus Schwab, en 1993 (à l’origine sous le nom de Global Leaders of Tomorrow, « Jeunes leaders de demain ») pour promouvoir le programme de mondialisation du FÉM.

La bannière de la page de renvoi de McKinsey, capturée le 16 janvier.

Le Forum économique mondial décrit sa mission dans une brochure institutionnelle de 24 pages.

Sous la rubrique « Notre mission: L’esprit d’entreprise dans l’intérêt public mondial, » nous sommes informés que:

Le Forum économique mondial est une organisation internationale indépendante qui s’est engagée à améliorer l’état du monde en incitant les chefs d’entreprise, les responsables politiques, les universitaires et d’autres leaders de la société à façonner les programmes mondiaux, régionaux et industriels. Constitué en fondation à but non lucratif en 1971 et basé à Genève, en Suisse, le Forum n’est lié à aucun intérêt politique, partisan ou national. (C’est nous qui soulignons en italiques.)

Sous la rubrique « Notre culture: une institution mondiale unique, » la brochure décrit le rôle du FÉM en tant qu’organisation internationale:

Une organisation internationale: Le Forum apporte sa contribution à la gouvernance mondiale dans les espaces informels, mais structurés qui se trouvent à la base des institutions et des cadres juridiques multilatéraux formels tels que le Fonds monétaire international, les Nations unies et l’Organisation mondiale du commerce. (C’est nous qui soulignons en italique.)

La question qui se pose est de savoir dans quelle mesure le FÉM joue un rôle actif dans l’élaboration des agendas mondiaux, régionaux et industriels et contribue à la gouvernance mondiale. Joue-t-il un rôle dans l’élaboration des politiques nationales de pays théoriquement souverains, par exemple en définissant leur politique d’immigration par le biais de sociétés de conseil mondialistes ayant des liens étroits avec les gouvernements de ces pays?

Il se trouve que la « transformation » était également un thème de la réunion du FÉM de cette année. Le thème du premier jour était « Bienvenue à Davos / Aperçu de la transformation. » Le troisième jour, le thème était « Transformation numérique, » rappelant l’objectif d’IRCC de se transformer avec l’aide de McKinsey pour « revoir, développer et mettre en œuvre des outils, des processus et des services numériques. »

Promouvoir un Canada plus grand – un effort à long terme mené par l’Initiative du siècle

La raison d’être de l‘Initiative du siècle est de faire passer la population du Canada à 100 millions d’habitants d’ici 2100. Elle a été fondée en 2011 par Dominic Barton, de McKinsey, et Mark Wiseman, un gestionnaire d’investissement qui travaille depuis 2016 avec la plus grande société de gestion d’actifs au monde, BlackRock. Les fondateurs de l’Initiative du siècle n’étaient manifestement pas satisfaits de la croissance démographique radicalement accélérée du Canada, lancée par la ministre de l’Immigration du premier ministre Brian Mulroney, Barbara McDougall, en 1990, et poursuivie par chaque gouvernement depuis lors. McDougall a augmenté le nombre d’immigrants admis au Canada à 250 000 par an, indépendamment des conditions économiques. Le sous-titre de l’article du Globe and Mail de 1990 décrivant la politique de McDougall est choquant par son honnêteté et aurait peu de chances de voir le jour dans le Canada du 21e siècle: « Le ministre voit une nouvelle source d’électeurs pour les conservateurs. » On aurait peut-être pu ajouter: « et une nouvelle source d’argent pour les puissants intérêts financiers. »

L’Initiative du siècle soutient que le Canada perdra sa pertinence s’il ne fait pas croître sa population et son économie de pair avec la population mondiale en plein essor et l’économie dévoreuse de ressources et en constante augmentation. « Nous pouvons gérer notre croissance ou accepter notre déclin, » nous informe l’initiative. Si l’ICP est d’accord avec l’affirmation de l’IS selon laquelle « Notre croissance démographique est liée à notre qualité de vie, » ce n’est probablement pas de la manière dont l’IS l’entend. Cette croissance massive dans un pays dont la frontière sud, densément peuplée, est déjà soumise à un stress écologique sévère, se ferait sous la bannière de la durabilité, bien sûr.

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Le message de l’Initiative du siècle sur le besoin désespéré d’accroître la population du Canada a été, sans surprise, promu par les intérêts commerciaux et les médias corporatifs. En mai 2012, le Globe and Mail a publié un long article intitulé « Pourquoi le Canada a besoin d’un déluge d’immigrants, » nonobstant le fait que ce déluge était en cours depuis 1990 et n’avait pas encore mis fin aux « pénuries de main-d’œuvre. »

Et maintenant, même après plus de 30 ans d’immigration massive, la menace de ces « pénuries de main-d’œuvre » pour l’avenir du Canada plane toujours. Dans un effort héroïque pour enfin terrasser ce monstre, le gouvernement Trudeau a encore ouvert plus grand les vannes. Il a d’abord annoncé de nouveaux objectifs en novembre 2017, visant 340 000 immigrants par an d’ici 2020, un objectif qui a déraillé avec l’avènement de la Covid-19. En novembre dernier, il a annoncé un objectif annuel de 500 000 nouveaux arrivants d’ici 2025 dans la seule catégorie de l’immigration (sans compter les travailleurs étrangers temporaires, les étudiants et autres).

Qui sont les personnes qui travaillent si dur pour accélérer la croissance du Canada et quelles sont leurs relations ?

L’objectif de l’Initiative du siècle, qui consiste à transformer les villes actuelles en « mégarégions, » est vraiment époustouflant. D’ici 2100, la population de Toronto devrait atteindre 33,5 millions d’habitants, celle de Vancouver 11,9 millions, celle de Montréal 12,2 millions et celle de la région de la capitale nationale 4,8 millions. Si cet objectif est atteint, ces quatre villes compteront à elles seules plus d’une fois et demie la population actuelle du Canada, soit environ 40 millions d’habitants. Apparemment, rien ne pourrait améliorer davantage le bien-être des Canadiens que de forcer la grande majorité d’entre eux à vivre dans ce que Norman Borlaug a décrit comme « la concentration grotesque d’êtres humains dans l’environnement empoisonné et bruyant de mégalopoles pathologiquement hypertrophiées ».

Mais, comme le dit le proverbe,  » le bonheur des uns fait le malheur des autres. » Ce qui semblait être un malheur pour Borlaug (et l’est encore pour l’ICP) est manifestement le bonheur de quelques-uns. Qui sont ceux qui baignent dans ce bonheur ?

Les deux fondateurs de la Century Initiative, Dominic Barton et Mark Wiseman, sont membres du Forum économique mondial, dont la réunion de Davos en 2023 a été promue avec tant d’enthousiasme par McKinsey & Company, où Barton a travaillé pendant 33 ans avant de quitter l’entreprise en tant qu’associé principal en juillet 2018, un mois avant que McKinsey n’obtienne son premier contrat avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. (Barton n’est pas resté longtemps sans emploi. En 2019, Trudeau l’a nommé ambassadeur du Canada en Chine, poste qu’il a occupé pendant deux ans).

Wiseman est un directeur général principal de BlackRock où, entre autres, il est président de son Entreprise alternative, qui comprend l’investissement dans l’immobilier privé, comme le marché du logement canadien qui devient de plus en plus inabordable pour les Canadiens. Indépendamment de Barton, la société McKinsey & Company a également des liens avec le FÉM, au-delà de la promotion de ses réunions annuelles à Davos. Entre autres, McKinsey et le FÉM travaillent ensemble pour « La résilience et la mondialisation dans un monde fragmenté« .

Prime Minister Trudeau embraces Dominic Barton at a 2017 reception (Christopher Katsarov/The Canadian Press)

Le premier ministre Justin Trudeau est également membre du Forum économique mondial, tout comme sa ministre des Finances et vice-première ministre Chrystia Freeland. Mme Freeland siège au Conseil d’administration du FÉM aux côtés de Larry Fink, PDG de BlackRock. C’est Dominic Barton qui, en janvier 2016, a personnellement présenté Justin Trudeau, en tant que premier ministre nouvellement élu du Canada, à la « foule » de Davos lors de la réunion annuelle du FÉM. Comme le président du FÉM, Klaus Schwab, a informé l’auditoire lors de sa conférence Malcolm H. Wiener à l’Institut de politique de la Harvard Kennedy School en 2017, les opinions du gouvernement de Trudeau s’alignent étroitement sur celles du FÉM. Mais les Canadiens devraient peut-être s’inquiéter du fait que Schwab se vante de voir son organisation « pénétrer les cabinets » du Canada et d’autres pays. L’état d’esprit mondial que soutient Schwab semble avoir sous-tendu l’affirmation au New York Times, d’un Justin Trudeau nouvellement élu, selon laquelle le Canada était le « premier état postnational, » sans « identité centrale, sans courant dominant. »

Le Conseil consultatif sur la croissance économique appelle à… plus de croissance économique !

En décembre 2015, deux mois après la première élection de Justin Trudeau comme premier ministre, son ministre des Finances, Bill Morneau, a annoncé la création d’un Conseil consultatif sur la croissance économique. En février 2016, M. Morneau a annoncé que le Conseil serait présidé par Dominic Barton, qui, à l’époque, dirigeait encore McKinsey, et les noms des quatorze membres du conseil, dont Mark Wiseman, ont été annoncés en mars. Le 31 octobre 2016, le magazine Maclean’s rapportait que le ministère des Finances avait confirmé que les consultants de McKinsey fournissaient au Conseil consultatif sur la croissance économique, dont les membres étaient payés 1 $ par an et qui n’avait pas de budget propre, des services bénévoles de « recherche, d’analyse et d’administration. » Quel altruisme !

En octobre 2016, le Conseil consultatif sur la croissance économique a produit son premier rapport. Sans surprise, il préconisait une augmentation massive de l’immigration, proposant un objectif de 450 000 immigrants par an, soit une augmentation de plus de 50% des niveaux d’immigration déjà élevés. Les rapports ultérieurs (le troisième et dernier publié en décembre 2017) ont tous promu des objectifs aussi élevés.

Un peu plus d’un an après la publication du premier rapport du Conseil consultatif, en novembre 2017, le ministre de l’Immigration de l’époque, Ahmed Hussen, a annoncé la première augmentation substantielle des objectifs d’immigration du gouvernement Trudeau, qui ont été fixés à 310 000, 330 000 et 340 000 pour 2018, 2019 et 2020, respectivement. Et en novembre 2022, alors que de nombreux Canadiens souffrent encore économiquement de la perturbation du Covid et que le coût du logement a explosé, l’actuel ministre de l’Immigration, Sean Fraser, a annoncé les nouveaux objectifs de 465 000, 485 000 et 500 000 pour 2023, 2024 et 2025, respectivement. Ces objectifs non seulement respectent, mais dépassent les recommandations du Conseil consultatif sur la croissance économique.

D’après les nombreux liens inactifs sur ce qui semble être sa page d’accueil, le Conseil consultatif sur la croissance économique semble ne plus être actif. Le fait que sa recommandation d’augmenter massivement l’immigration soit mise en œuvre par le gouvernement signifie peut-être que sa mission est essentiellement accomplie. Alors que la Century Initiative est un groupe de pression enregistré, le Conseil consultatif sur la croissance économique a promu essentiellement le même programme en tant qu’organe consultatif officiel.

Le Canada est-il encore un pays souverain ?

L’Initiative du siècle va jusqu’à présenter l’adhésion du Canada à l’immigration massive comme un devoir moral. En faisant défiler sa page d’accueil, on vous demande: « De quel côté de l’histoire le Canada se situera-t-il? » Elle oppose la « montée du nationalisme, du populisme et du sentiment anti-immigrants » à l’échelle mondiale à « l’ouverture à l’immigration » et à la « culture du multiculturalisme et de la diversité » du Canada. Le sous-entendu est que si le Canada n’accueille pas un flot sans cesse croissant de nouveaux arrivants, il s’associe à certaines idéologies politiques laides. Vous ne trouverez nulle part sur le site web de l’Initiative du siècle une discussion sur la façon dont certains groupes d’intérêt (tels que les spéculateurs, les promoteurs, les fournisseurs de prêts hypothécaires, les entreprises de main-d’œuvre bon marché et les politiciens à la recherche du vote ethnique) récolteront pratiquement tous les avantages économiques et politiques de la politique d’immigration massive du Canada, tandis que les travailleurs canadiens ordinaires en paieront le prix en termes de villes plus congestionnées et polluées avec moins d’espaces verts, de pression accrue sur les services de santé, d’éducation et sociaux déjà sous pression, ainsi que sur les transports et les infrastructures, et de logements de plus en plus inabordables.

Jason Hafso on Unsplash

La politique d’immigration du Canada s’aligne pleinement sur les objectifs d’hypercroissance par l’immigration de l’Initiative du siècle mondialiste. Malheureusement, le Canada plus grand et plus audacieux promu par l’Initiative du siècle ne sera pas un meilleur Canada pour ses habitants actuels, et encore moins pour son environnement et sa biodiversité. Plus de trente ans d’hyperimmigration mondialiste n’ont pas amélioré le bien-être du travailleur canadien moyen et ont massivement biaisé la distribution des richesses en faveur des riches.

Si les Canadiens ne commencent pas à exiger de leurs responsables politiques qu’ils répondent à la question de savoir quels intérêts ils servent, ils pourraient bientôt ne plus reconnaître le pays que l’Initiative du siècle et le Forum économique mondial sont en train de créer pour eux.

Madeline Weld, Ph.D.
Présidente, Institut canadien de la population
Tél.: (613) 833-3668
Courriel: [email protected]
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