De façon subliminale et manifeste, les Canadiens reçoivent fréquemment des messages indiquant à quel point l’immigration (de masse) est merveilleuse.
Et ils ont besoin de rappels, parce que l’Initiative du siècle est consciente que sa vision d’un Canada glorieux de 100 millions d’habitants ne correspond pas à l’expérience vécue par de nombreux Canadiens alors que l’immigration de masse les propulse vers cet avenir. Cela pourrait expliquer pourquoi Goldy Hyder, président et chef de la direction du Conseil canadien des affaires et membre du conseil d’administration de l’Initiative du siècle, a encouragé les politiciens à garder le silence sur l’immigration avant les élections de 2019.
L’introduction de Lisa Lalande, PDG de L’Initiative du siècle, à la fiche de rendement 2024 contient la déclaration suivante : « Et pourtant, il serait stupide et tout simplement antihistorique de ne pas reconnaître de quoi sont capables ces débats, centrés sur l’immigration et notre identité nationale. Qu’ils peuvent être annonciateurs d’anxiété et de peur, qu’ils peuvent fomenter la haine, qu’ils peuvent conduire à des débats aussi nuisibles qu’improductifs. »
Traduction : « Nous serons dans le pétrin si les gens comprennent ce que nous manigançons. »
Cette organisation est-elle vraiment derrière les politiques d’immigration du gouvernement?
Comme le montre l’histogramme vers le début de cet article, les niveaux élevés d’immigration dépassant les 300 000 par année ont doublé depuis que Justin Trudeau est devenu premier ministre, et sont maintenant en moyenne plus de 600 000 par an, malgré la chute en 2020 en raison de la COVID. Mais pouvons-nous être sûrs que les politiques de Trudeau sont guidées par l’Initiative du siècle?
À tout le moins, nous pouvons présenter un cas circonstanciel solide. Rappelons que l’un des cofondateurs de l’Initiative du siècle était Dominic Barton, qui a occupé des postes de direction chez McKinsey and Company. Le 4 janvier 2023, Radio-Canada a fait des allégations selon lesquelles McKinsey était fortement impliqué dans l’établissement des politiques d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Cette histoire a été reprise par CBC News, qui a rapporté que jusque-là, le gouvernement de Justin Trudeau avait dépensé trente fois plus pour McKinsey que celui de son prédécesseur Stephen Harper, un total de 66 millions de dollars contre 2,2 millions de dollars pour Harper. Le ministère qui a le plus utilisé les services de McKinsey était l’IRCC, avec des contrats de 24,5 millions de dollars pour des conseils de gestion.
La CBC a rapporté que deux sources distinctes d’IRCC qui ont toutes deux occupé des postes de direction au plus fort de l’influence de McKinsey ont parlé à Radio Canada sous le couvert de l’anonymat. Les sources estimaient que les bureaucrates d’IRCC avaient été mis de côté et que la politique avait été décidée à leur égard. L’une des sources a déclaré qu’on a dit au ministère de prendre comme plan de base un rapport de 2016 du Conseil consultatif sur la croissance économique, dirigé par Dominic Barton, qui appelait à augmenter progressivement les niveaux d’immigration à 450 000 par an.
La chronologie suivante peut être construite à partir de reportages de Radio Canada et de CBC News et d’autres sources :
Octobre 2015: Justin Trudeau est élu premier ministre et, peu de temps après, il dit à un journaliste du New York Times que le Canada est le premier pays postnational.
Décembre 2015: Le ministre des Finances, Bill Morneau, annonce la création du Conseil consultatif sur la croissance économique.
Janvier 2016: Dominic Barton présente personnellement Justin Trudeau en tant que premier ministre nouvellement élu à la foule de Davos lors de la réunion annuelle du Forum économique mondial.
Février 2016 : Morneau annonce que le Conseil consultatif sera dirigé par Dominic Barton.
Mars 2016 : Morneau annonce qui sont les autres membres du Conseil consultatif, dont Mark Wiseman.
Octobre 2016 : Le Conseil consultatif sur la croissance économique publie son premier rapport, recommandant une augmentation de 50 % des objectifs d’immigration, pour les porter à 450 000. Les rapports subséquents (3e et dernier rapport en décembre 2017) ont fait la promotion d’objectifs similaires.
Octobre 2017 : Le ministre de l’Immigration Ahmed Hussen annonce des objectifs d’immigration pour les trois prochaines années de 300 000 à 340 000 par an.
Juillet 2018 : Dominic Barton quitte McKinsey and Co. après 33 ans au sein du cabinet.
Août 2018 : McKinsey obtient son premier contrat avec IRCC. D’ici janvier 2023, IRCC versera à McKinsey 24,5 millions de dollars en contrats.
Septembre 2019 : Trudeau annonce la nomination de Barton au poste d’ambassadeur en Chine.
2020 : Les niveaux d’immigration plongent en raison de la COVID.
Novembre 2022 : Le ministre de l’Immigration, Sean Fraser, annonce des cibles de 450 000 à 500 000 immigrants par année de 2023 à 2025.
Le 15 mai 2023, les libéraux et le Nouveau Parti démocratique ont rejeté une motion du Bloc québécois visant à rejeter les objectifs de l’Initiative du siècle et à ne pas s’en inspirer dans l’établissement des niveaux taux d’immigration. Le Bloc craint que des niveaux d’immigration élevés n’affaiblissent la position du Québec et l’usage du français au Canada. Bien que le ministre de l’Immigration, Sean Fraser, ait pris ses distances par rapport à l’Initiative du siècle lors des débats précédents, il a également voté contre la motion. Il en a notamment été de même pour les deux membres élus du Parti vert.
Un Canada plus grand et brisé
Sur son site Web, l’Initiative du siècle affirme qu’une population plus importante et une main-d’œuvre plus importante créeront plus d’activité économique. « Cela signifie plus d’argent des contribuables potentiel que nous pourrions utiliser pour maintenir et améliorer les services sociaux, y compris les programmes de soins de santé et de sécurité du revenu ; et l’infrastructure nécessaire.»
Pour de nombreux Canadiens, ces mots sonneraient comme une blague cruelle. De nombreux services, en plus de l’abordabilité du logement, approchent de la chute libre, et l’infrastructure se détériore. Il n’y a aucune raison valable de promouvoir l’immigration de masse au Canada et de nombreuses raisons valables de s’y opposer.
Le rapport 2019 de l’Initiative du siècle porte le titre « Pour un Canada plus grand et plus audacieux », mais les Canadiens vivent un Canada plus grand et plus brisé. Selon un sondage Ipsos de juin 2024, 70 % des Canadiens sont d’accord avec le chef conservateur de l’opposition, Pierre Poilievre, pour dire que le Canada est brisé. Ce chiffre passe à 78 % chez les Canadiens de 18 à 34 ans et à 73 % chez les 35 à 54 ans. Parmi les personnes de 55 ans et plus (qui sont plus susceptibles d’avoir remboursé leur hypothèque), 61 % pensent que le Canada est brisé.
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Voir le rapport ci-joint qui critique l’impréparation du gouvernement. Voir graphique page 5.